AFP, 4 octobre 2019 Un adolescent de 15 ans est décédé après avoir été poignardé, ce vendredi en fin de matinée, lors d'un cours d'EPS aux Lilas (…). Trois collégiens, tous nés en 2004, ont été placés en garde à vue, soupçonnés d'être les auteurs des coups de couteau reçus par la victime, scolarisée à Aubervilliers (…). La victime se serait interposée au cours d'un « conflit entre deux individus de deux bandes rivales » et n'était pas la cible. Le jeune était en arrêt cardio-respiratoire à l'arrivée des secours qui ne sont pas parvenus à le réanimer.
En 2018, j’ai appris la mort par balle d’un jeune, ancien élève que j’avais suivi en 3ème métallerie chaudronnerie : une rixe entre deux bandes de quartier rivales.
Là est née la nécessité, l’urgence de raconter.
Requin-Chagrin, écrit à partir d’un récit autobiographique, nous parle d'aujourd’hui, d’une société qui a peur des requins comme des adolescents et ne prend pas en compte les difficultés de la jeunesse : quel modèle d’adultes at-elle ? Que fait notre société pour que ses jeunes -ses forces vives-, puissent expérimenter des projets forts sans que leur vie soit mise en danger ? Quels lieux alternatifs à l’errance pourrions-nous imaginer pour que les plus relégués puissent quitter un temps au moins leur cage d’escalier, leur hall d’immeuble, leur aire quotidienne ?
Ce spectacle rend hommage à tous ces adolescents, élèves de SEGPA ou d’EREA sortis du système traditionnel, jeunes hommes en colère contre l’injustice, et que j’ai côtoyés tous les jours pendant des années.
La question de l’adolescence m’a toujours passionnée, ce mélange du tout-petit et du tout-puissant... Cette prise de risque, cette violence dont certains sont capables sur leur territoire et, en même temps, cette peur qui les habite dès qu’ils sont loin de chez eux, me touchent.
Requin-Chagrin veut rendre aussi hommage aux enseignants, aux éducateurs qui essayent de faire autrement, qui prennent l’élève, le jeune, l’adolescent dans sa globalité, avec son histoire passée, son présent, ses peurs, ses rêves de futurs, ses forces et ses fragilités.
Ce spectacle, malgré la mort tragique de son héros, Mamadou, est une traversée pour ses camarades et leur enseignante. Une traversée qui rend plus fort et qui permet à ceux qui restent en vie de mettre des mots sur les maux.